« Artisigner vosgien » - Artisan-designer en forêt vosgienne
Après une expérience de designer en Chine, Manuel Derler fait un retour vers la matière naturelle, le bois et le travail à la main. Une reconversion d’ébéniste lui permet de s’installer dans les Vosges à Les Voivres et de devenir Atisigner, artisan-designer.
Manuel souhaite se rapprocher de matières et de notions plus authentiques, plus locale avec ses créations en série limitée de mobilier en bois éco-géré utilisant colle et vernis naturels ou résine biosourcée. Cela en respectant l'environnement au maximum.
"Comme au bon vieux temps, rapport au discours lors des études de design passées, il s'agit de raconter une histoire avec mes créations en m’inspirant et rendant hommage aux montagnes vosgiennes qui m’entourent". Solidement ancrée dans son terroir, Manuel scie, cisèle, colle, assemble et ponce les différentes essences de bois.
Notre Stratos a été diplômé en design transport en 2003. Suite à de longues années de designer free-lance, Manuel s’est lancé dans une grande aventure avec une expatriation en Chine. Il y a dessiné des produits électroniques grand public, de l’architecture d’intérieur pour des hôtels et des night-clubs, ...
Résistant à la crise économique mondiale de 2008, Manuel est resté travailler en Chine.
Avec quatre associés (trois français et un chinois) il a monté « Métis Agency » en 2009, puis en 2013, c’est le studio de design « ColinDerler » qui a vu le jour, une agence d’architecture d’intérieur, basée sur Guangzhou).
Fin 2015, Manuel prend la décision de revenir en France où il entame sa reconversion aux Métiers d'art en tant qu'artisan ébéniste. Son CAP. en poche, il est attiré par la forêt vosgienne et la noblesse du bois. Armé de sa formation initiale en design, Manuel devient "Artisigner", à la fois artisan et designer. Il explore et expérimente sans cesse les formes, les concepts et les techniques afin de dépasser les codes classiques de l’ébénisterie traditionnelle. Ce positionnement fait de Manuel cet "Artisigner", avec le savoir-faire de l'artisan et le talent du designer.
Création 100% vosgienne !
Une création 100% vosgienne signifie créer localement. Cette exigence s’accompagne du souci du détail et de l’observation. La provenance de chaque matière et matériau pèse dans les choix des créations. "Le développement des produits de masse pour une large production ne fait plus du tout sens depuis mon retour de Chine" Nous déclare Manuel. "Produire localement signifie le zéro km avec mes partenaires et avec les acteurs régionaux. ... Le cycle d’approvisionnement doit être le plus court possible. J’ai le désir de réaliser des pièces d’exception dans leur mode de réalisation, leur matériau et une conception durable ». Il s’agirait de vivre et de ressentir l’âme-même des éléments de mobilier, ...
Du prototype à phase de production en série limité- [TRôBE]
[TRôBE] est en phase de mise au point depuis la fin 2018. Ce tabouret est le fruit d'un long travail réalisé durant sa reconversion en ébénisterie. En effet, il a passé une année au sein de l'atelier d'ébénisterie LAVAL à Liffol-Le-Grand, Vosges. Son objectif est de produire une série limitée de ce tabouret. Réduire son coût de production est aussi un objectif important. Actuellement au stade de prototype, le coût de revient est élevé, environ 1000 euros. Cela comprend le temps de mise au point, les matières, la R&D et le packaging. L'objectif de prix public et de diviser ce coût par 3. Une gamme de mobilier décliné autour de ce concept et d’accessoires de déco sont également en cours de développement.
Dans les mois à venir, une collection pourra voir le jour, mais cela impliquera un gros investissement et une prise de risque qui est toujours à l’étude…
Implantation locale
«La Boëte au sein de Terre de Hêtre » est la couveuse d'entreprise qui incube l’atelier de Manuel et Pacelor qui l'accompagne au niveau économique et juridique. Depuis septembre 2019, l’activité de Manuel s'inscrit dans une dynamique vertueuse de mutualisation de compétences de créatifs voisins / voisines avec un partage et des échanges de savoir-faire et savoir-être, ...
La Boëte a pour objectif est le meilleur fleurissement possible des activités économiques sur la région. Le partage des espaces de travail s'inscrit dans cette dynamique vertueuse où chaque partenaire devient complémentaire et plus fort ensemble. Dans la réalité des choses, il faut comprendre que : "à la campagne et dans les territoires ruraux, ces choses sont accélérés grâce au partenariat entre FabLab, mais aussi avec les écoles et les institutions publiques surfant sur la vague du foisonnement des FabLabs plus citadins, apparus dans les grandes agglomérations et villes voisines.
« La Boëte » est une couveuse axée sur l'innovation bois rattachée au pays d’Épinal. Celle-ci est jumelée au Fablab XYLOLAB, ainsi que l'ENSTIB, L’école d’ingénieur du bois de la ville d’Épinal. Ces accords permettent de bénéficier d'un atelier et bureau mutualisés et du suivi d'ingénieur…
Positionnement et clientèle
L’identité professionnelle de Manuel est toujours en phase de définition. A la fois auto-éditeur, Manuel se considère comme un « Artisigner ». Entre acteur de l’artisanat et du design local, Manuel parle ainsi de « Tradinnovation » : « Je m’associe à la mouvance des « Makers » mais avec une touche artisanale. Il s’agit d’un mélange de tradition et d'innovation qui s’adresse à une clientèle sensible attentive à une production durable. Celle-ci semblerait également en quête d'authenticité, Je m'inspire des Vosges qui m'entourent , de la nature et de la culture propre à cette région en leur rendant hommage à travers mes pièces, avec par exemple, ma console d'entrée [MôN] inspirée de la vue du Hohneck sur le Mont Blanc, avec l’utilisation de matériaux responsables, de conception écologique « made in Vosges ».
Ce que m'apporte le travail du bois
"Travailler les assemblages des différentes essences des bois que j'ai présélectionnés m'apporte une satisfaction que je ne retrouve nulle part ailleurs. Le souci du travail bien fait, avec l'assemblage par queue d’aronde sur la version ébénisterie du tabouret [TRôBE], me permet de voir la robustesse et la force par la matière. La sensation de la matière physique reste inégalée". Cependant la force humaine peut parfois rencontrer ses propres limites. Ainsi, d'autres procédés plus modernes d'usinage avec la CNC (machine à commande numérique) ou le gravage laser enrichissent les créations de Manuel. Celle-ci contribue grandement à la variété et au détails dans son mobilier.
"R&D" (recherche et développement)
"Le travail du bois massif, lamellé-collé et contreplaqué est une première approche de mon travail d'artisan. L'utilisation de fibre naturelle et de résine bio sourcée pour une résistance accrue et pouvoir jouer sur les épaisseurs de mes pièces en est une autre. Cette seconde année de reconversion m'a amenée à l'exploration d'autres matériaux tels que la pierre, le béton, le métal comme le projet d'upcycling de la lampe [TôURET] à découvrir prochainement sur mes réseaux sociaux, Les déchets issus de l'artisanat sont partout autour de nous. Allant de ma propre production que j'essaie de revaloriser au maximum comme de celle de mes partenaires dans d'autres matières.
Arrivera dans le futur, la réutilisation de déchets, .., D'autres univers que le bois, déjà disponible à 2 pas d'ici. Il s'agira de nouvelle manière de travailler avec des matériaux biens locaux et toujours en R&D, dans mes futurs objets …."
Strate Alumni : Quelle est ta vision du design aujourd'hui :
Manuel Derler : Depuis ma prise de conscience et mon retour de l'étranger, je désire des créations durables en accord avec le respect l'environnement. Comprendre que mes pièces ne se retrouverons pas dans l’estomac d'un animal, c'est mieux ! J'ai un besoin de retour au concret avec une création locale au contact direct avec la matière. Cela partant de mes fournisseurs et mes partenaires, ... Depuis plusieurs décennies, l'Asie produit et envoie de part le monde des bateaux remplis de matériaux d'ameublement contre-collés à base de résines synthétiques. Il y a urgence ! Le commerce mondial est une chose, mais le retour au savoir-faire local doit se réinventer.
Par ailleurs, dans cette récente formation, CAP bois et ébénisterie, nous étions pour la plupart en période de reconversion. Âgés de 22 à 53 ans, issus de domaines différents de l'artisanat, (...) menuisier en chaise, tapissière d'ameublement, vannière, vitrailliste et nèoniste, nous étions toutes et tous en phase de perfectionnement.
Aujourd'hui, nous restons en contact et envisageons des collaborations dans un avenir proche pour un mélange de nos compétences et de nos savoir-faire.
SA : Quel souvenir gardes-tu de ton passage à Strate :
M.D. : Des années formidables. J'ai le souvenir d'une petite école à taille humaine où nous mangions tous ensemble derrière l'atelier à Issy-les-Moulineaux avec Philippe Courbarie, et Alain Jacquemin, ... qui nous parlait de sciences humaines. J'y ai crée des amitiés fortes et durables.
SA : Quels seraient tes conseils aux stratos :
M.D. : La période des études est une période charnière, propice à une prise de conscience. Créez du mieux que vous pouvez, en étant les plus responsables possible.
Photographe Arnaud Bantquin © ArnaudBantquin
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